
Genève, 20 février 2025 – Ces cinquante dernières années, la CITES – la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction – a joué un rôle inestimable dans la conservation des espèces sauvages : en réglementant le commerce de ces espèces, en veillant au respect du texte grâce à des mesures efficaces à cet effet, et en combattant et enrayant la criminalité liée aux espèces sauvages. Aujourd’hui, tandis que les menaces pesant sur les espèces sauvages s’intensifient jusqu’à atteindre des proportions inédites, notamment sous l’effet de la triple crise planétaire, jamais il n’a été plus urgent de réglementer le commerce international de ces espèces pour en assurer la durabilité et la légalité et pour que les espèces sauvages puissent survivre dans la nature.
Ces impératifs ont été réaffirmés à la 78e session du Comité permanent de la CITES (SC78), qui s’est déroulée à Genève (Suisse) du 3 au 8 février 2025. Depuis sa création, jamais le Comité permanent n’avait atteint un tel taux de participation à l’une de ses sessions, avec un chiffre record de 594 participants et 11 organisations inscrites en qualité d’observatrices. La SC78, dernière session du Comité avant la 20e session de la Conférence des Parties à la CITES (CoP20), qui se tiendra à Samarcande, en Ouzbékistan, au mois de novembre 2025, a permis de faire le point sur les avancées des Parties dans plusieurs domaines : la conservation, la réglementation du commerce, la lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages, et le renforcement de la durabilité et de la traçabilité des prélèvements et du commerce des espèces sauvages inscrites à la CITES.
Un ordre du jour bien chargé
Durant ses six jours de réunion, le Comité a examiné 82 des 87 points qui étaient inscrits à l’ordre du jour, 127 documents de travail et 50 documents d’information, et il a tenu 18 débats. Face à une telle charge de travail, il avait été décidé, pour gagner du temps et rationaliser le déroulement des travaux, que la durée des interventions serait limitée et que les rapports seraient transmis par écrit. Grâce à la bonne coopération des membres du Comité permanent et des observateurs, les points inscrits à l’ordre du jour ont quasiment tous pu être examinés. Quelques-uns ont néanmoins été directement transmis à la CoP20 sans accord à leur sujet au sein du Comité.
Pays hôte de la 20e session de la Conférence des Parties à la CITES (CoP20) et pays candidat pour accueillir la 21e session de la Conférence des Parties à la CITES (CoP21)
La réunion a commencé par une cérémonie au cours de laquelle le logo de la CoP20 a été dévoilé par Son Excellence, M. Aziz Abdukhakimov, ministre ouzbek de l’Écologie, de la Protection de l’environnement et du Changement climatique.
Le Panama, qui avait accueilli la CoP19 en décembre 2022, a proposé d’accueillir une nouvelle fois à Panama les Parties à la Convention et les observateurs, cette fois pour l’édition 2028 de la Conférence des Parties à la CITES.
Renforcer le respect de la CITES
Le Comité a annoncé la levée de la suspension du commerce du scorpion empereur (Pandinus imperator) en provenance du Togo, qui était en vigueur depuis 2013. De plus, le Comité a noté que la Tanzanie avait appliqué les recommandations concernant le bois de santal est-africain (Osyris lanceolata), et a convenu du retrait de cette combinaison espèce/pays du processus d’étude du commerce important.
Le Comité a pris acte des progrès réalisés par divers pays auxquels s’applique l’article XIII à savoir, notamment : le Bangladesh, le Cameroun, l’Équateur, la République démocratique populaire lao (RDP lao), Madagascar, le Nigéria et le Mexique. Six Parties – l’Andorre, le Botswana, la RDP lao, la Sierra Leone, la Tunisie et l’Ouganda – ont en outre adopté une nouvelle législation pour faire respecter les dispositions de la CITES, ce qui fait passer le nombre total de Parties respectant la Convention de 117 à 185.
Dans son allocation de clôture, la Secrétaire générale de la CITES, Mme Ivonne Higuero, a déclaré : « Le respect de la Convention reste au cœur de votre mission. J’observe avec satisfaction les progrès accomplis par tous ceux qui s’acquittent de leurs engagements et réalisent des avancées majeures en matière d’application concrète de la Convention aux espèces marines, de bois et d’oiseaux. Nous continuerons à vous épauler dans ces efforts. »
Plusieurs débats étaient axés sur l’élevage en captivité d’animaux sauvages et sur les conséquences de telles pratiques pour la conservation des espèces concernées. Pour approfondir l’examen de ces questions, des réunions vont être organisées, voire un atelier sur les spécimens qui ne sont pas d’origine sauvage. L’élevage en captivité du macaque à longue queue, un point très préoccupant, est resté au centre des débats ; la suspension de commerce en vigueur pour la RDP lao a été maintenue et une mission technique va être diligentée au Cambodge.
Améliorer la lutte contre la fraude pour enrayer la criminalité liée aux espèces sauvages
Les mesures prises pour faire respecter la CITES et lutter contre le commerce illégal d’espèces sauvages ont été de nouveau au cœur des débats de la SC78. Il a été question de corruption, des flux financiers illicites issus de la criminalité liée aux espèces sauvages, de la criminalité en matière d’espèces sauvages liée à internet, et de bien d’autres thèmes encore. Le Comité a proposé à cet égard que des modifications soient apportées à deux résolutions : la Résolution Conf. 17.6 (Rev. CoP19), Interdire, prévenir, détecter et réprimer la corruption qui facilite les activités menées en violation de la Convention, et la Résolution Conf. 11.3 (Rev. CoP19), Application de la Convention et lutte contre la fraude.
Compte tenu des résultats de la Réunion de l’Équipe spéciale sur le commerce illégal de spécimens d’espèces d’arbres inscrites aux annexes de la CITES, le Comité a décidé de soumettre des projets de décisions à la CoP20 pour que l’attention dont bénéficie cette question ne retombe pas. Le soutien dont bénéficient les Parties d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale dans la lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages a été renforcé, et de nouvelles décisions proposées pour demander au Secrétariat CITES et à ses partenaires au sein du Consortium international de lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages (ICCWC) d’intensifier le soutien ciblé.
« La communauté internationale est de plus en plus consciente de l’incidence de la criminalité liée aux espèces sauvages sur la nature et les populations », a fait observer la Secrétaire générale. « La coopération internationale reste essentielle dans notre lutte contre ce type de criminalité. Les excellents résultats obtenus dans le cadre des activités menées à bien par les Parties, avec le soutien de l’ICCWC, incitent à l’optimisme. »
Lorsque les participants ont examiné, au cours de leurs échanges, l’application de la CITES à l’égard de certaines espèces en particulier, ils ont notamment évoqué le trafic de spécimens d’acoupa de MacDonald. Le Comité s’est félicité des progrès réalisés par le Mexique dans la mise en œuvre de son plan d’action en vue du respect de la CITES, et il a encouragé la poursuite de la coopération qu’entretiennent la Chine, le Mexique et les États-Unis dans le cadre du Groupe de contact trilatéral sur la lutte contre la fraude pour combattre le commerce illégal d’acoupas de MacDonald. De nouvelles recommandations ont été approuvées afin de renforcer la lutte contre le commerce illégal des grands félins, des pangolins, des hippocampes, des guépards, des rhinocéros, des tortues marines et de diverses autres espèces.
Espèces aquatiques et espèce d’arbres – Points soumis à la CoP20
Le Comité a examiné le tout premier projet de résolution sur le commerce, la conservation et la gestion des espèces d’anguillidés, qui fera l’objet d’échanges plus approfondis à la fin de l’année, à la CoP20, en Ouzbékistan.
Les délégués ont examiné une série de projets de décisions approfondies sur les requins et les raies destinés à être soumis à la CoP20 et ils ont contribué au Guide rapide pour la réalisation d’avis d’acquisition légale. Ils ont notamment transmis des preuves de légalité le long de la chaîne de responsabilités pour les espèces marines, ils ont évoqué la possibilité d’indiquer les lieux de capture dans les signalements et d’assurer en permanence la liaison avec des organes régionaux de pêche, des organisations régionales de gestion de la pêche et avec la FAO.
Le Comité a décidé qu’il fallait finaliser le projet de rapport sur les archets en bois-Brésil (Paubrasilia echinata) pour le soumettre ensuite à la CoP accompagné de plusieurs décisions sur l’élaboration de systèmes volontaires de marquage ou d’identification et de mécanismes d’enregistrement des stocks.
Après examen du rapport de l’atelier régional CITES sur les avis de commerce non préjudiciable (ACNP) et sur les avis d’acquisition légale (LAF) concernant le bois de rose d’Afrique de l’Ouest (Pterocarpus erinaceus), le Comité a encouragé les Parties à continuer de communiquer leurs expériences et meilleures pratiques en ce qui concerne les ACNP et les LAF, dans une volonté de partage des connaissances et de renforcement des capacités.
Pleins feux sur la CoP20 et au-delà
Comme il s’agissait de la dernière session du Comité permanent avant la 20e session de la Conférence des Parties à la CITES (CoP20), qui se tiendra à Samarcande, en Ouzbékistan, en novembre 2025, la SC78 a jeté les bases sur lesquelles reposeront les échanges à venir. Son programme de travail chargé n’a pas empêché le Comité de constater que le respect de la Convention s’était amélioré, que la lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages avait progressé, et que la coopération s’était intensifiée pour garantir la durabilité et la légalité du commerce international des espèces sauvages. À la CoP20, les Parties se retrouveront afin de définir la voie à suivre pour assurer la protection des espèces inscrites à la CITES au cours de la prochaine période intersessions.
La CoP20 leur donnera également l’opportunité d’examiner le rôle de la CITES au sens large, c’est-à-dire sous l’angle de sa complémentarité avec d’autres accords environnementaux multilatéraux (AEM) et de sa contribution à la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) et au Cadre mondial de la biodiversité de Kunming à Montréal (CMBKM), et de faire le point sur l’avancement de Vision de la stratégie CITES, pour un monde où tous les échanges internationaux concernant des espèces sauvages sont légaux, durables et traçables.